C’est en décembre dernier, prenant le contrepied de la morosité économique ambiante, que Stéphanie Cagni et Amélie Mariller ont décidé de prendre leur envol. Embarquant avec elles leur salarié, Paul Bendahmane, les co-gérantes ont créé la Scop Atelier Pop Corn, à Lyon, après 3 années passées à tester leur activité au sein de la Coopérative d’Activité et d’Emploi Escale Création. Spécialisé dans l’Assistance à Maîtrise d’Usage, l’Atelier Pop Corn fait dialoguer ceux qui conçoivent, construisent et vivent les territoires et redonne une place aux habitants et citoyens dans la transformation de leur cadre de vie.
Faire dialoguer les différents acteurs du territoire
« La notion d’Assistance à Maîtrise d’Usage est très récente », explique Stéphanie Cagni, l’une des deux co-gérantes de l’Atelier Pop Corn « et quand nous nous sommes lancées en 2017, nous n’avions que peu de concurrence sur ce créneau dans la région. Nous sommes encore à ce jour les seuls à nous adresser à l’ensemble des publics, enfants autant qu’adultes ». L’AMU consiste à faire dialoguer des parties prenantes qui ne se rencontrent pas habituellement, ou dans de mauvaises conditions, sur les projets de transformation des territoires : collectivités, bailleurs, architectes, urbanistes, paysagistes, citoyens/habitants engagés, citoyens/habitants ne se sentant pas légitimes à s’exprimer… « Notre rôle consiste à interroger, accompagner par la médiation, former, animer des expérimentations avec tous ces différents publics afin de faire émerger des propositions constructives qui répondent véritablement aux caractéristiques des territoires et de ceux qui y vivent. Les espaces publics, logements ou espaces de travail doivent être pensés avec, et non à la place de leurs usagers » précise encore Stéphanie Cagni.
D’entrepreneures salariées… à co-gérantes de Scop Sarl
Cette prise de conscience est l’aboutissement du parcours des deux co-gérantes. L’une et l’autre salariées pendant 15 ans en tant qu’ingénieure en construction durable dans des bureaux d’études et en tant que consultante en communication publique dans le privé, les collectivités locales et les cabinets d’urbanistes et architectes, elles constatent, nourries par ailleurs par leurs engagements citoyens, qu’il manque une marche dans l’accompagnement du citoyen/usager. Elles décident alors de « tester des réponses à ces problématiques » en 2017 en tant qu’entrepreneures salariées de la Coopérative d’Activité et d’Emploi lyonnaise Escale Création, « afin de [se] lancer dans un cadre sécurisé ». « Très rapidement, la Maîtrise d’Œuvre s’est emparée de ce sujet, et nous avons connu un fort développement. Un an plus tard, nous avons été amenées à recruter Paul [Bendahmane, urbaniste] pour répondre à l’activité croissante ! » précise la co-gérante. C’est portées par cette même dynamique qu’elles décident, en 2020, de voler de leurs propres ailes en créant leur Scop. « L’année 2020 nous a permis de faire mûrir notre projet, de nous poser les bonnes questions sur les valeurs et la vision que nous avons de notre métier. La crise sanitaire a été une chance et un accélérateur pour nous : elle nous a également libéré du temps pour sensibiliser et former les acteurs du territoire pour qu’ils osent se lancer. Fin 2020, on s’est senti assez fortes, avec une visibilité à 3-4 ans, pour finaliser notre cheminement vers la création de la Scop.»
La crise sanitaire, terreau fertile pour repenser les territoires
La crise sanitaire n’a pas seulement permis au projet interne de l’Atelier Pop Corn d’éclore : elle s’avère un formidable terreau pour repenser les territoires. « La crise démultiplie les capacités d’inventer. Nous le ressentons très fortement : de nouveaux projets citoyens voient le jour, les collectivités réorientent leurs appels d’offres… Cette crise a soulevé plein de nouvelles questions concernant l’occupation temporaire d’espaces publics, la mobilité, le partage des espaces, l’importance d’un accès à des espaces végétalisés… Actuellement, nous sommes en particulier mobilisées sur deux projets de « débitumisation » de cours d’écoles, dans le Rhône et l’Isère. La question de la place de l’enfant dans la ville est un sujet qui nous tient particulièrement à cœur et nous sommes fières de réussir à faire dialoguer autour de ces projets des publics qui n’échangent pas d’ordinaire, pour imaginer ensemble des propositions constructives. »
Des projets qui devraient continuer à se développer au sortir de la crise, au regard des enjeux environnementaux, et pour lesquels la jeune Scop prévoit de nouvelles embauches à moyen terme.