Quatre piliers, quatre entreprises coopératives : nous avons décroché nos téléphones pour comprendre comment elles agissent au quotidien. Et oui, elles n’ont pas attendu cette étude nationale sur la citoyenneté économique pour prendre à bras le corps ces problématiques centrales ! Voici donc un panorama avec Les Menuisiers du Rhône, Le Fournil des Comètes, L’Atelier Paysan et Fontanille.
Le partage des pouvoirs avec Rolland ARNAUD, PDG de Fontanille Scop (43) :
« Notre entreprise a 160 ans de savoir-faire, qui aurait pu disparaître si nous ne l’avions pas reprise en Scop il y a 9 ans. Aujourd’hui, la formation est à la base de tout, chez Fontanille. C’est par ce biais que nous donnons envie aux salarié·e·s de participer à cette belle aventure humaine. Cela se traduit par un parcours de formations techniques et coopératives de 3 mois environ à l’embauche, et de formations régulières pour l’ensemble des salarié·e·s, quelle que soit l’ancienneté, pour une montée en compétences continue Je souhaite qu’elles et ils soient pleinement impliqué·e·s, fier·ères de leur travail, plus autonomes, considéré·e·s dans leurs prises de décisions, en atelier comme dans les bureaux. Nous sommes actuellement 44 salarié·e·s et 38 associé·e·s, mais avec les 7 personnes embauchées cette année, nous atteindrons un sociétariat proche de 100 % l’an prochain, puisque tous et toutes ont vocation à devenir sociétaires.
la formation est à la base de tout, chez Fontanille. C’est par ce biais que nous donnons envie aux salarié·e·s de participer à cette belle aventure humaine.
Nous faisons face par ailleurs à un enjeu fort actuellement : la plupart des sociétaires ayant 30 ans d’ancienneté en moyenne, nous anticipons la transmission des savoir-faire, par le recrutement de jeunes en concordance avec leurs besoins et aspirations. Chez Fontanille, chacun·e peut apporter sa pierre à l’édifice, et c’est notre grande force, notamment auprès de nos clients. »
Le partage des richesses avec Hugo PERSILLET, animateur et formateur chez L’Atelier Paysan (38) :
« Dès le départ, il y a à l’Atelier Paysan une forme d’utopie dans la façon d’aborder les conditions de travail, avec l’égalité salariale et l’autogestion comme credo. Hormis les 2 dirigeants fondateurs, qui jouent le rôle d’employeurs, de coordinateurs et de portage politique, il n’y a pas de différence hiérarchique au sein de l’équipe salariée. Nous sommes toutes et tous embauché·e·s à 2000€ net, toutes et tous cadres, avec 10 semaines de congés (5 semaines de congés payés et 5 semaines de repos compensatoire). Ce qui implique que l’on attend de nous d’être proposants, de participer à la stratégie et au bon fonctionnement de la Scic.
Pour autant, il nous est aujourd’hui nécessaire d’aller plus loin. Je dirais que sur la question de notre gouvernance, nous passons de l’idéologie à la réalité. D’abord parce qu’il était urgent de trouver un relai aux épaules de nos 2 fondateurs sur le départ. Ensuite parce que notre structure est passée de 5 à 30 salarié·e·s en six ans. Nous venons donc de mettre en place un Conseil de surveillance pour « capaciter » nos sociétaires en leur donnant des responsabilités légales. Cela ne s’est pas fait en un claquement de doigts. Nous avons conçu des formations, mis en place des binômes salarié·e·s / sociétaires, amélioré nos critères de recrutement aussi.
Dans notre projet, une adhésion de soutien ne suffit pas. Être sociétaire, c’est être copropriétaire de la structure et en assurer la responsabilité. Et on y met les moyens en terme d’animation, tout en restant en veille sur les questions de confort et de sécurité au travail. Cerise sur le gâteau ? Nous voici désormais un certain nombre à être syndiqué·e·s, au grand étonnement des centrales syndicales : en coopérative, nous ne luttons pas contre le méchant patron, mais davantage contre notre tendance à nous auto-exploiter. »
Être sociétaire, c’est être copropriétaire de la structure et en assurer la responsabilité. Et on y met les moyens en terme d’animation, tout en restant en veille sur les questions de confort et de sécurité au travail.
Le bien-être au travail avec Clément PONS, fondateur et associé du Fournil des Comètes (26) :
on a été très vite d’accord sur le fait qu’on aspirait à trouver un modèle économique viable mais qui ne vienne pas empiéter sur nos vies personnelles.
« Quand on a monté le projet du Fournil des Comètes en 2018 avec Elise, on venait chacun d’avoir des enfants, et on a été très vite d’accord sur le fait qu’on aspirait à trouver un modèle économique viable mais qui ne vienne pas empiéter sur nos vies personnelles. Aujourd’hui, on constate qu’on est arrivé à un équilibre qui nous convient bien ! En fait, c’est devenu la condition sine qua non, la colonne vertébrale de notre projet : toutes nos réflexions en découlent, et on cherche constamment à traduire techniquement cette philosophie.
Concrètement, « travailler moins pour vivre mieux », cela veut dire ne pas travailler de nuit, et donc proposer une offre plus restreinte aux clients, avec du pain de grande qualité et des brioches, et ce sur des horaires d’ouverture moins étendus. Cela veut dire aussi adapter nos méthodes de travail, avec une panification plus moderne : pas de façonnage, très peu de manutention, ce qui nous fait gagner jusqu’à 3h par jour. On a une grande vigilance sur l’ergonomie de nos postes aussi. Aujourd’hui, on est 5,5 ETP : on est toutes et tous au même taux horaire, et toutes et tous à égalité entre la production et la vente, avec en plus, pour les 3 associé·e·s, des spécialisations tournantes tous les 2 ans sur les RH, la maintenance, la relation fournisseurs… Ça rend le quotidien moins répétitif, ça change la dynamique. Toutes nos décisions sont prises collectivement chaque semaine, et 1 à 2 fois par an, on se réunit en séminaire pour réinterroger notre pacte d’associé·e·s et remettre à plat le projet d’entreprise. Cela permet de s’assurer que notre projet rester cohérent avec nos aspirations ! »
La responsabilité de l’entreprise avec Marie-Line MURADORE, comptable chez Les Menuisiers du Rhône (69) :
« La RSE est un sujet dont Les Menuisiers du Rhône se sont emparés dès 2010, sous l’impulsion d’Alex POTOCKI. Pour une Scop centenaire, on peut dire qu’on est précurseur sur la démarche du développement durable et le projet d’entreprise citoyenne ! En tant que Scop, c’est même inscrit dans nos gènes. C’est pourquoi, sous l’impulsion de la Fédération des Scop du BTP, notre dirigeant Denis BOISSON a relancé cette démarche coopérative. Rapidement, Jérémy BIGOTTE, présent depuis 2013, Denis, et moi, qui suis arrivée fin 2020, on est devenu référents dans l’entreprise. Lors de notre AG en juin, on a partagé la démarche avec l’ensemble des 32 salarié·e·s, pour que chacun·e s’en empare et la porte sur son poste, au quotidien. Ça a été également l’occasion de signer un avenant au projet d’entreprise pour y inscrire cette démarche. Elle se traduit sur plusieurs volets. Sur l’aspect environnemental, nous utilisons des bennes de tri et de collecte Recygo pour nos déchets. D’ailleurs, nous n’oublions pas de recycler les masques. Nous sommes aussi sensibles à la provenance des bois que nous transformons. Depuis 2011, nous sommes écocertifiés PEFC, et audités tous les ans. Enfin, nous avons déjà acquis deux véhicules électriques, et nous projetons de remplacer toute notre flotte de véhicules diesel.
Sur le volet humain, la Scop accorde une grande attention aux conditions de travail. Nous avons intégré une intervenante pour les questions RH et formation. La sécurité nous importe particulièrement et sur ce plan, nous pratiquons l’amélioration continue, en fonction des remontées terrain. Par exemple, on est passé sur des finitions à l’eau pour supprimer les solvants toxiques et on a construit un local équipé d’un système d’aération spécifique. On a également adapté un poste de travail pour un salarié en situation de handicap.
Toutes nos actions s’inscrivent dans une démarche « Engagé RSE » avec l’AFNOR qui doit aboutir à l’obtention du label RSE SCOP BTP. »
Pour une Scop centenaire, on peut dire qu’on est précurseur sur la démarche du développement durable et le projet d’entreprise citoyenne ! En tant que Scop, c’est même inscrit dans nos gènes.